Le mot ronce, dis-tu? Je me souviens
De ces barques échouées dans le varech
Que traînent les enfants les matins d’été
Avec des cris de joie dans les flaques noires
Car il en est, vois-tu, où demeure la trace
D’un feu qui y brûla à l’avant du monde
– Et sur le bois noirci, où le temps dépose
Le sel qui semble un signe mais s’efface,
Du feu qui va en mer la flamme est brève,
Mais quand elle s’éteint contre la vague,
Il y a des irisations dans la fumée.
Le mot ronce est semblable à ce bois qui sombre.
Et poésie, si ce mot est dicible,
N’est-ce pas de savoir, là où l’étoile
Parut conduire mais pour rien sinon la mort,
Aimer cette lumière encore? Aimer ouvrir
L’amande de l’absence dans la parole?
Yves Bonnefoy, Ce qui fut sans lumière, Paris, Poésie Gallimard, 1991, p. 42
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